1 – Retrouvailles

CONTE MORAL ET INITIATIQUE 17 Comments »

La liberté, c’est savoir reconnaître ce qui est nécessaire

Friedrich Engels

Ce qui m’est indispensable ne se range pas dans une valise, ni dans un carton.

Ni le vent, ni le ciel, ni le soleil ne s’achètent…
Ils appartiennent à tous !

Ce que nous emmenons avec nous le jour où l’on ferme les yeux seront ces belles choses et les regards de ceux que nous avons aimé…

Ce matin, j’ouvre les volets et je vous avoue que ce geste me manquait !

Pousser le bois, voir la peinture écaillée s’étaler en étoiles sur mes doigts, entendre le grincement sourd des gonds secs et rouillés, et recevoir en pleine figure la lumière…

Celle qui éclaire le tilleul qui ne m’offre pas encore ses corolles si parfumées…

Celle qui illumine le cerisier où des étincelles rouges commencent à s’éparpiller…

Celle qui fait blondir les blés et grandir le maïs, et qui brûle les près et qui fait tarir la fontaine…

Celle dont j’ai besoin aujourd’hui, parce que mêlée au vent d’Autan elle n’a pas son pareil pour rendre mon âme moins grise…

Celle qui depuis ma plus tendre enfance me fait rougir et pas que de plaisir !
Je l’observe, mais de loin et je la taquine, mais à l’ombre…

Je vais jouer à cache cache !

La nuit à été bonne et j’ai dormi la fenêtre ouverte !
Les bruits des grillons et des rainettes de la fontaine m’ont fait oublié ceux de la ville…

Seulement deux jours que je suis arrivée ici, dans cet endroit si cher à mon coeur, à mon esprit…

Ranger, dépoussiérer, aérer !

Toute une matinée pour retrouver mes marques, mes petites habitudes…
Durant ces trois mois, il y aura du passage comme les autres années, très peu manqueront à l’appel !

Hier après-midi, je suis allée faire mon petit pèlerinage, car le lendemain de chacune des mes visites j’ai besoin de voir ce village, de toucher ses pierres , de me replonger dans ses rues montantes et sinueuses…

Malgré la chaleur, j’ai laissé la voiture en bas et j’ai grimpé, un peu essoufflée à l’arrivée !

Le plaisir se mérite ne dit-on pas ?

Les artisans ont ouvert leurs échoppes et je vais pouvoir aller fouiner, dire bonjour à quelques amis…

Juste passer, juste me rendre compte, juste voir et revoir, ne jamais me lasser.

Prendre des nouvelles, faire semblant de s’étonner !
Discuter beau temps, enfants et chiffre d’affaire…

Les rassurer, l’été à presque commencé et de plus en plus de vacanciers aiment à goûter à des plaisirs plus simples, plus intimes…

La preuve je suis toujours là, encore et encore et toujours…

Quelques heures vite passées et hop retour au frais, dans mes chers murs…

Je suis surprise de voir une moto dans la cour de la maison la plus proche…
Je me souviens des mes étés ou mes oncles me prêtaient leurs jumelles pour scruter les près au loin, les brebis laissées seules…

Les voisins aussi et surtout !

Je passe ma route, mais une moto, des volets ouverts…
De nouveaux propriétaires ?

Dix ans à cause d’une indivision toute bête que La Josseraie est silencieuse…

Je rentre et je fouille dans les tiroirs et voilà que je les retrouves ces fichues jumelles, celles qui les samedi soir du mois de juillet nous faisaient bien plus rigoler que les Maritie et Gilbert Carpentier !

Parce que la maison est située en face d’un point de vue, enfin d’une vue imprenable sur un tout petit village et sa rivière…

Un banc installé là et nous nous régalions de cette vie tout en bas qui aurait pu être la notre…

Voir sans être jamais découvert l’arrivée du pharmacien et de sa petite famille le temps d’un week-end dans leur belle maison à étages et court de tennis !

Mais surtout profiter de l’animation de la seule auberge du village, avec sa terrasse au bord de l’eau…

Compter les voitures et se dire, ce soir le père Laurent va encore se faire des sous !

Quelques Parisiens qui louaient dans le coin, les habitués des alentours qui venaient terminer leur semaine de travail en se faisant plaisir avec une friture ou des écrevisses…

Des baptèmes aux communions en passant par les mariages, nous étions au premières loges et Michel Delpech et Rika Zaraï nous faisaient danser nous aussi, mais dans nos têtes !

Je me sens un peu bizarre ce soir, les jumelles à la main…
Ceux que j’aimais ne sont plus là et la magie s’en est allée avec eux…

Pourtant je vais m’installer sur ce banc pour me laisser envouter par le chant des grillons,
laisser piquer ma tendre peau par des moustiques qui ont peut-être ” l’accent”,
m’étourdir en respirant un vent dont je suis discrètement amoureuse…

J’ai oublié d’arroser, mais je sais que demain j’irais au marché chercher quelques croquants et échaudés…

Et puis je me sens moins seule, j’ai peut-être des voisins…

A suivre !

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