Si on me demandait de nommer le principal bienfait d’une maison, je répondrais : notre maison abrite nos rêveries.
Gaston Bachelard
Joddy était couchée à mes pieds et respirait faiblement, elle avait eu très chaud et ce petit havre de paix qu’était la maison abandonnée allait lui permettre de reprendre sa force tranquille !
Mes souvenirs allaient bon train !
Je gavais Mark de mes pérégrinations enfantines, par delà les chemins oubliés, les champs pas encore jachérisés…
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Sans doute parce que j’étais sereine et à l’écoute, je divaguais ma passion avec un certain délice, et le regard de Mark s’appuyant sur moi devait quelque part en être la cause…
La légende de cette maison, c’est mon oncle qui me l’a raconté, il y a bien longtemps…
Il ne trichait pas aux cartes, mais il aimait enjoliver, ajuster à sa façon la vérité !
Ce sentier tout petit avait été très grand puisque des carrioles à deux chevaux le traversait allègrement pour rejoindre le village les jours de Foire.
D’autres maisons sans doute devaient s’éparpiller le long de cette voie abritée par des chênes verts et des châtaigners mais il n’en restait aucune trace.
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Seuls persistaient ces quelques murs enrobées de mousse et de lierre…
Je me rappelle du bâton que mon oncle ne quittait jamais.
Pour houspiller les serpents disait il !
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Aujourd’hui, je me souviens…
En 1944, l’endroit qui avait servi de refuge pour des résistants, avait été incendié par des miliciens traqués par la FFI
Bien avant la guerre, la maison avait été laissée à l’abandon pour une sombre histoire d’indivision et était devenue une sorte de gîte pour des braconniers en tous genre !
Si la vieille charpente de chêne n’avait pas résisté, les murs noircis se tenaient fiers et droits au milieu d’un amoncellement de tuiles canales et d’orties.
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C’est en 1958 que des bruits commencèrent de courir…
Firmin, le facteur du village, racontait qu’un dimanche en descendant le chemin pour aller à la pèche, il s’était arrêter à lou casau* pour préparer ses mouches.
Ce jour là, il fut intrigué par un bruit inhabituel, une sorte de chuchotement inaudible…
En s’approchant plus près d’un mur, il voulut poser son oreille sur les pierres et qu’elle ne fut sa surprise !
La lauze était chaude mais surtout sa texture ressemblait à la fourrure d’un animal, d’un lièvre…
Ses mains suivirent les pierres et partout la même douceur, le même velours…
Elles avaient aussi changé un peu leur couleur !
Plus claires, beaucoup plus lumineuses comme si la lumière du soleil leur avait ôté leur souffrance, leurs brûlures, leurs cicatrices…
Notre homme n’en croyait pas ses yeux et eu peur !
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Un fonctionnaire ne pouvait mentir, la légende allait devenir vraie…
D’autres habitants cette année là purent à leur tour vérifier les dires de Firmin !
Le lieu, les murs, tout avait changé…
Même le vent d’Autan semblait contourner l’endroit !
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Le facteur aurait pris des photos, mais hélas on ne pouvait discerner sur aucune d’elles la moindre trace que de nombreux regards avaient pourtant validés…
Le temps passa et en 1963 un couple d’anglais qui pratiquait le camping sauvage…
Mark m’écoutait et buvait mes paroles !
Nous commencions à avoir faim et nous priment la sage décision de pique-niquer avant de descendre vers la rivière…
J’arrêtais quelques instants mon récit pour sortir du sac à dos notre Gaillac rosé et nos échaudés !
Joddy fut la première à déguster notre frugal repas…
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L’air doux, le moelleux de la mousse, la douceur d’un regard, tout contribuait à rendre ce moment inoubliable et exaltant aussi !
Prendre le temps, ensemble, pour mieux s’apprivoiser, se comprendre encore plus, était facile avec un tel compagnon…
C’est avec un verre à la main, un vrai, que je reprenais mon récit…
A suivre !
*Maison en ruines en Occitan
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