Arôme du coeur, Prune

PARFUM DE COULEURS 14 Comments »

Le sens de l’odorat, peut-être plus que tous les autres, a le pouvoir d’évoquer les souvenirs.

Il est dommage que nous n’en fassions pas plus grand usage.

Rachel Carson


J’y ai toujours vu un prunier à cet endroit là.

Petit espace presque aride où ronces et orties faisaient avec l’aubépine une sorte de frontière avec le jardin potager.

Je ne me souviens plus très bien de son printemps, de la couleur de ses fleurs…

C’est en août que je le retrouvais, que je le reconnaissais.

*

Franchir le danger de la haie, les jambes griffées et rougies, le bonheur se trouvant au bout du chemin !

Je gardais mes espadrilles pour affronter l’aventure, mes pieds nus ayant déjà subi l’assaut des abeilles qui se gorgeaient du sucre chaud et parfumé des fruits.


Sur l’herbe jaunie, les prunes s’étalaient en mosaïques de toutes les couleurs.

Violettes, écarlates presque noires, la chair dénudée ocre et brillante, elles  se donnaient au plus offrants !

*

Je n’osais les ramasser et pourtant je savais que c’était les meilleures qui s’éparpillaient, qui s’éclataient au soleil.

Sur les branches, elles avaient l’air rabougrît, ridé, plissé, moins appétissante et surtout trop facile à conquérir !

A dix ans, on est téméraire pour rien, enfin si, juste pour le plaisir…

*

Ruser sans se faire prendre, savoir écouter le bruissement de l’insecte, trop de silence, il me fallait attendre !

Puis s’enhardir, jeter une main sur le trésor, et se l’engouffrer très vite dans le gosier !

Ne pas perdre une miette de ce précieux cadeau,  j’en parle et j’ai déjà son goût dans la bouche, presque celui du plaisir défendu.

Se régaler de pas grand chose, faire la voleuse, regarder de tous les côtés, peur d’être vue chez soi ?

J’ai la mémoire qui flanche, je ne me souviens plus du nom de ces fruits, des prunes qui pouvaient faire des pruneaux me disait ma grand-mère.

Et puis la confiture, quatre heures  sur la vieille cuisinière à bois, le cuivre et l’écume rose qui brillait à petit feu…

De l’enfance, j’ai gardé la gourmandise !

Pas seulement celle des parfums, celle du regard qui glisse sur une photo,  mais celle du coeur, la plus goûteuse.

Simplicité, je t’aime !




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