2 – Ma pluvieuse

CONTE MORAL ET INITIATIQUE Add comments

Rien qui m’appartienne, sinon la paix du coeur et la fraîcheur du ciel

Kobayashi Issa

 

Presque trois jours que je suis ici et le temps ne m’a pas vu passer !

J’essaie de le contourner, et je crois savoir comment l’apprivoiser…

Mais chutt…

Les amis retrouvés, la maison rangée et le jardin arrosé par une douce pluie, toute tendre…

Celle qui ne fait pas de bruit, qui se fait discrète de peur qu’on la surprenne…

Parce qu’elle est peureuse cette eau venue du ciel !

Elle tremble à la moindre apparition d’un ciré et d’une paire de bottes…

J’arrive à  me faire légère pour passer au travers de ses larmes et elle le sait, alors elle me laisse faire et je ne suis jamais bien mouillée !

Si les carreaux de la chambre n’avaient pas été brouillés je ne me serais aperçue de rien…

Mais au travers des jolies traces, j’ai vu !

Vu une moto, presque une silhouette, qui s’éloignait de la Josseraie…

Un homme ? une femme ? Chabada bada !

Mais comme je suis une battante, pas comme cette insignifiante pluie, j’ai pris mon courage à une main !

L’autre tenant le parapluie, je suis entrée dans le jardin…

Surprise, un jardinier avait du s’arrêter en chemin, tout semblait plus aéré !

La grille noire avait été repeinte, et la petite allée désherbée…

Le banc en pierre du Sidobre taillée par mon grand oncle semblait se faire tout petit au milieu d’une végétation bien plus luxuriante que celle laissée par mes souvenirs…

Toute première fois que je pénétrais chez les ennemis !

Je ne sais toujours pas pourquoi cette famille et la mienne s’était fâchée mais ce dont je me souviens exactement ce sont des détours que je faisais pour monter au village…

Mon coeur chamadait à chaque passage, même de très loin !

On m’expliquait gentiment que la mémé qui habitait là avec ses deux fils et une de ses belles filles avait une sorte de don de mauvais augure !

Elle jetait des sorts aux hommes et aux animaux…

Dans cette région proche du Gévaudan, il y a encore des croyances de ce genre, des guérisseurs !

Je n’en menait pas large et ce matin je me suis enhardie même si je n’ai pas encore passé l’âge de croire aux contes de fées et aux maléfices…

La petite bergerie et le poulailler ont  disparu, et je suis au moins sûr que la grand-mère ne me fera pas pourchasser par son bouc et ses coqs !

Plus d’engin motorisé, plus personne pour l’instant…

Je tends  le cou vers la fenêtre ouverte sur la pièce principale qui ne comporte aucun meuble, juste un lit défait dans une alcôve.

Une vieille cuisinière en fonte mais rutilante, garnie de cuivre nargue les murs qui avaient jadis dû être blanc…

Le vent dans les branches du cerisier, la pluie un peu plus dense et des frissons le long de mes bras nus, je me sauve !

Je reviendrais, je le sais…

J’ai fais le premier pas et il me tarde de connaître les nouveaux occupants !

Les petits enfants, des étrangers ?

Dans une heure le boulanger, et je ne veux pas le manquer !

Je pourrais d’un coup de voiture prendre la route pour sa boutique mais s’il n’a plus assez de clients comment vont faire tous ces retraités, tous ces gens qui approchent les 90 ans…

Leur chance, pouvoir se tenir debout, être indépendant…

Le facteur et le boulanger, bien plus que des commerçants !

Des amis de longues dates pour certains, leur petite fenêtre ouverte, quelques mots, les nouvelles de là-haut…

Indispensable à la vie d’ici et à leur vie…

Cet après-midi, j’ai retrouvé ma pluvieuse !

Cachée à côté du puits, connaissant bien la fente dans les pierres pour rejoindre l’antre de sa maison humide et sombre…

Elle fait peur à certain, moi elle me rassure !

Toujours seule ?

Je vous la présenterai bientôt…

Il se fait tard, je vais sans doute faire semblant de lire, ouvrir la porte pour écouter le dehors et peut-être comme hier soir apercevoir quelques lucioles…

Respirer l’air que l’on m’offre, et prendre le temps d’arrêter la pendule du salon…




11 Responses to “2 – Ma pluvieuse”

  1. Chriss Says:

    Alors, t’as fait ta curieuse ? T’es allée chez les voisins et tu ne les as même pas vus donc ! Tu vas devoir y retourner, dis-tu ? ah bon !
    Comme tu voudras…

    J’adore les photos de Doisneau !
    bisous ma belle

  2. jean-jacques Says:

    C’est sans doute cela le talent d’une conteuse sans compter; c’est un peu comme si on y était dans ses bagages, posés dans un coin et à ranger peut-être plus tard. Alors, on en profite pour prendre le pouls de l’atmosphère dans tous les sens d’une généreuse tranche de vie!
    Merci!

  3. boutfil Says:

    j’aime bien aussi la photo de l’enfant au pain
    bises

  4. Poulbot Says:

    Bonsoir belle Virginie,
    Très beau texte et j’aime les deux premières
    images, très poétiques.
    A demain, pour la suite de tes aventures…
    Bises
    Poulbot

  5. Charles Says:

    et alors… cette “Pluvieuse” et ces voisins…? good contact or not..?

  6. Cortisone Says:

    J’aime cette pensée pour nos anciens, l’existence nous courbe… et cette pendule du salon qui dit oui qui non…
    Venir te lire, c’est comme lire un instant de vie. Merci.
    Je t’embrasse, belle journée Virginie.
    Leila

  7. Flavien Says:

    On y était , comme toujours! Quelques jolis détournements de formules, et on voit le jardin, on entend le moteur fugitif, on s’interroge sur les mystères du passé ou du présent et on repart avec une impression délicieuse.

  8. Virginie Says:

    @CHRISS Coucou ! Mais non la photo, c’est W RONIS Le petit parisien en 1952, si tu passes la souris sur la photo je l’ai inscrit !
    Pour le voisin j’y passe demain, alors je raconterai lundi…
    Bisous et bon week-end !!!

    @JEAN JACQUES Merci ! Talent de conteuse, je ne sais pas, j’apprends mais je me pique au jeu et je ne m’arrête plus, et je n’en ai pas envie non plus !!!!

    @BOUTFIL Oui, j’adore cette photo moi aussi !
    Paris, ta ville avec Ronis !
    Gros bisous !

    @POUBOT J’aime les maisons, j’aime les pierres et le bois et j’aime ces vielles maisons peintes souvent par des américains d’ailleurs mais si tu survoles avec ta souris les images, tu connaitras leur nom !

    @CHARLES Pour la pluvieuse, il faudra attendre quelques jours… Pour le reste, je vais m’enhardir et aller chez mes ou mon voisin samedi matin ! Je raconterai lundi…
    Bises et bon week-end sous le soleil bien sûr !

    @LEILA Merci de tes passages… Les pendules je les arrête souvent et j’ai assez la notion du temps, car même sans montre, je n’arrive jamais en retard et j’arrive bien à me situer dans le temps à quelques minutes prés !
    Les anciens aiment à vivre et rester dans leur village, coupé de tout souvent et j’aime les rencontrer…
    Bisous et encore merci !!!

    @FLAVIEN Merci à toi aussi ! Et tu va y être pour longtemps car j’ai pris pieds dans cette maison et je m’y sens bien, plus envie de la quitter…. Des mystères il va y en avoir jusqu’à l’automne…
    Bisous et bonne soirée ou bonne nuit !!!!

  9. Poulbot Says:

    Bonjour belle endormie..
    Et que que crois-tu que j’ai fait en découvrant tes images ?. Mais comment les retrouver, sinon sur ton blog ?. Allez, chuchote-moi cela à l’oreille!. Tu sais parfaitement où me joindre et sans doute mon adresse e-mail….mais pas de blog, tu ne dois avoir qu’un nom mystère !
    Bises

  10. Poulbot Says:

    4h05 du mat
    j’ai trouvé “ton vivier”….mais j’aurai toujours plus de plaisir à le découvrir sur ton blog.
    Encore deux heures et l’aube se pointera …
    n’oublie pas les jumelles !
    je te suis…

  11. Virginie Says:

    @POULBOT Coucou ! Très heureuse de te rencontrer ailleurs…
    En ce moment, je ne tiens plus trop le coup le soir, je me couche plus tôt !
    Bisous et à bientôt !!!!

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