L’automne est descendu sur le parc de Cheyne Walk.
Les arbres ne sont plus des arbres. Infinis dégradés de tous les ors, de tous les roux, de tous les flamboiements secrets gagnés par l’ombre et le poids du passé.
Feuilles d’ambre de Cheyne Walk, rousseur de chevelure immense déployée sur le pavois du souvenir.
Femme le parc, femmes les feuilles de papier, femme la terre et l’odeur douce amère après la pluie, femme la mémoire.
Autumn, Philippe Delerm
Raconter les histoires, Eric savait le faire et avec chaque saison.
Conter l’Automne au travers de Magali et Isabelle, parce que l’une ne veut pas entrer en dilettante amoureuse, et que l’autre à les deux pieds dans le bonheur !
Cache cache ludiquement sentimental comme toujours chez cet homme qui Sait les femmes…
Ballade entre Drôme et Ardèche, couleur rousse des vignes, rubis du vin et arc en ciel pour les coeurs !
Se jouer du temps, celui qui rend encore plus belles celles qui ont dépassé la quarantaine…
Delerm et Rhomer, des regards posés sur l’Automne, saison qui devient féminine…
L’Automne que nous conte Philippe est celui des Préraphaélites, de leurs muses aux longs cheveux roux, teint laiteux et yeux mordorés…
Et ce beau jeune homme, romantique comme on aime se l’imaginer, cet Anglais fils de Poète Italien émigré à Londres, c’est Dante Gabriel Rossetti.
C’est de sa rencontre avec les peintres William Homan Hunt et John Everett Millais que naîtra la fameuse Confrérie Préraphaélite.
*
De ses amours avec Elisabeth Siddal, des tableaux…
Elle deviendra Sa Béatrice et L’Ophélie de Millais.
Dans ces Contes d’Automne, la femme se rêve, se dilue dans la lumière, son ombre se propage comme le parfum enivrant et suave de la rose Brother Cafdael…
Elle est saison, surement toutes !
Mais les couleurs prémices à l’hiver lui vont bien, lui offre le plus beau des écrins, lui donne des airs mystérieux…
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Et à chaque rentrée, je ne peux m’empêcher de relire encore et encore Autumn !
De me caler sur un fauteuil avec une bonne tasse de chocolat pain d’épices, le livre posé tout près de moi…
Sur les genoux, celui de Laurence Des Cars qui raconte ces peintres “modernes” qui faisaient vaciller leurs idées sous un règne Victorien puritain…
L’Automne me vas bien, et pas seulement au teint !
Je le laisse m’engourdir, s’enrouler autour de mon cou, et je m’amourache comme au premier jour…
Il me conte, me réconforte, et je compte sur lui !
Des feuilles à ramasser sans modération et avec le coeur
Juste le regard qui change sur un endroit précieux découvert hier, le petit étang chez ma voisine…
Finalement, quitter une saison n’est pas si grave !
Une date sur un calendrier, et puis nos yeux qui se chargent de l’interprétation selon notre état d’âme du moment.
De faux jumeaux, l’un rose et l’autre pas !
Pourtant, depuis quelques jours ils échangent leurs couleurs…
Caméléon que l’automne, qui se cache, se fait discrète, secrète, si bien que certains yeux se dérobent à sa rencontre.
Moins de vif, de violence, mais de la douceur dans la pâleur…
Curieuse saison où le chèvrefeuille semble arrêter le temps, mais comment fait il pour ne pas prendre une ride, d’avril en septembre, même allure et surtout même parfum…
Les abeilles se régalent encore !
Et eux, se demandant pourquoi ils sont si loin de chez eux !
Val de Loire étonnant, des rivières, des vignes, des lauriers roses, du mimosa et des bananiers…
L’automne leur offre un flou, une sorte de halo aérien, à cause de la lumière je pense !
*
Et puis l’eau se fait charmeuse, ondule avec la brise et ressemble au sable après la marée…
L’eau fait aussi des ronds sans les petits patapons !
Elle peut faire des vagues aussi, si si même celle de l’étang, et ne nous fions pas trop à l’eau qui dort…
Et vers quatre heures le goûter !
Du pain sec et pourtant pas punies les belles muettes…
Depuis quelques semaines je ressemble un peu à ce paysage !
Je suis là, je vogue, je survole, je lis, je me pose quelques fois mais tout est un peu flou…
*
J’avoue que mon attention s’est perdue un peu, l’éloignement du clavier sans doute, mais surtout une petite baisse de régime
Depuis des années un 14.8, et depuis quelques temps, un 10.4 qui n’arrive pas à se hisser plus haut !
Comme je ne crois pas que le ciel puisse m’aider, je vais prendre mes rêves par la main, et avec de la bonne volonté, quelques kiwis et une bonne dose de gelée royale, je vais revenir pour de bon, chez vous, chez moi, partout
Dommage que l’entrain ne se conserve pas dans une bouteille, depuis un an et demi, j’aurais pu en faire provision !
Encore quelques heures et j’espère que le koala qui sommeille en moi va se réveiller
A bientôt, à tout de suite, à tous à l’heure, à demain !
De l’automne à l’hiver, de l’hiver au printemps, du printemps à l’été, de l’été à l’automne.
Ainsi passe l’année en perpétuel changement, ainsi changeons nous…
Nous allons si vite que nous ne nous apercevons même pas que nous bougeons !
Dinah Mulock CraiK
J’écoute et on me dit que c’est la fin de quelque chose.
Fin de l’été ?
Mais non, pas encore !
Je cherche à savoir où peut bien se cacher le petit grain de sable que je n’ai pas encore trouvé…
Mes yeux ne lisent pas la vie comme il faudrait peut être ou c’est le regard des autres qui oublie que l’important c’est ici et maintenant.
*
Un nouveau mois aujourd’hui, un qui est un commencement pas une chute mais juste un passage, une vague brumeuse qui va sur son chemin donner aux choses leur vraie douceur…
La longueur du jour va s’estomper comme les couleurs, et les verts, et les bleus auront encore bien plus de charme…
Je suis amoureuse de la nature, de celle qui explose en pleine figure mais aussi de ses nouvelles couleurs, les grisées…
*
Souvenez vous, écoutez cette chanson parce qu’en Septembre…
Parce ce qu’il y a des pays qui vous parlent d’eux à travers la musique…
Mon élan me porte depuis l’enfance vers des lieux verts et blancs où la brume se fait douce pour envelopper les secrets…
J’aime être charmée par le petit à petit, par le j’attends un peu, par la timidité, par ceux qui observent et qui savent prendre leur temps.
Les bisous, mais pas tout de suite !
Il y a des endroits qui savent se faire mériter, se faire désirer…
Là ou l’on perçoit de l’abrupte, du rugueux se cache souvent des trésors à découvrir !
Le regard doit s’aiguiser, et tel un fantôme traverser des murs épais, des citadelles invisibles mais pas invincibles et par delà les mots pénétrer les territoires…
Un homme m’a fait découvrir un pays parce qu’il le transportait avec lui et une ville parce qu’elle lui à tout donné et c’est lui qui le dit…
La substance de mon coeur provient tout entière de Bergen. La beauté naturelle de la ville, ses habitants, toutes ses réalisations et ses activités ont été pour moi sources d’inspiration…
Cet homme doué, bienveillant et courtois qui commença le piano à l’âge de six ans d’abord avec sa mère et ensuite au conservatoire de Bergen puis de Leipzig , fut le premier grand compositeur Norvégien.
C’est à Copenhague, centre de la vie intellectuelle et culturelle dans ces années 1864 qu’il rencontra celui qui fut son meilleur ami, celui là même qui fonda l’Ecole de Musique Nationaliste Norvégienne, Rikard Nordraak.
Ils décidèrent tous deux de « consacrer leur vie à traduire l’âme Norvégienne »…
Deux ans plus tard, Rikard meurt des suites d’une tuberculose mais notre homme n’abandonne pas son but.
Sa cause sera désormais la mienne, sont but sera le mien.
Ne croyez pas que j’oublierai ce à quoi il avait aspiré.
Un voyage en Italie avec la découverte de Bellini, Rossini et Donizetti dont il trouva « la musique épouvantable » !
Puis ce sera le retour à Christiana, devenue Oslo aujourd’hui, et même si l’accueil ne fut pas des plus chaleureux il parvint en octobre 1866 à donner un concert ou Nina sa fiancée et aussi cousine, chanta quelques lieder de Nordraak et lui-même interpréta plusieurs lieder dont il avait composé la musique et Hans Christian Andersen les paroles…
Et il devint alors le Chef d’Orchestre de la Société Philarmonique d’Oslo !
En juin 67, il épousa Nina et en avril 68 naissait leur fille Alexandra…
Cette année là notre homme fit une découverte importante avec un recueil de Musique Populaire de la campagne Norvégienne, Anciennes et Nouvelles Mélodies de nos montagnes, de l’organiste Ludvig Lindemann.
Ce livre allait devenir sa plus grande source d’inspiration…
En 1874, si Ibsen lui commanda ce qui devait rester son œuvre la plus célèbre, une musique de scène pour Peer Gynt c’est parce que Listz vouait une très grande considération à notre ami !
Travail difficile parce que sujet compliqué à l’extrême…
Ce fut un véritable succès avec seulement 37 représentations, parce qu’un incendie ravagea le Théâtre de Christiana !
Au calme à Hardanger il composa son fameux quatuor à cordes, le Solitaire dans la montagne.
Création importante puisque la Famille Royale fut présente au premier concert…
Pendant les années 1880, de nombreuses tournées et créations…
L’homme passionné par son pays et ses richesses se fatiguait et décida alors de s’établir définitivement dans l’Ouest Norvégien et mena une vie plus régulière…
Randonnées en montagne avec quelques amis, création bien sur et aussi quelques concerts… Il ne savait résister à ce plaisir…
Il reçut de nombreuses distinctions, il fut même nommé Docteur Honoraire des Universités d’Oxford et de Cambridge …
En 1898, la ville de Bergen organisa une Exposition des Arts et Traditions Norvégienne et il fut invité pour y ajouter un Festival de Musique !
Il réalisa là son vieux rêve…
Bien sur quelques unes de ses œuvres furent interprétées, mais il voulait faire connaître de jeunes compositeurs peu connus comme Svendsen, Selmer, Nordraak et d’autres…
Le public, principalement des villageois et des paysans se mirent à pleurer en écoutant cette musique, leur musique celle de leurs racines…
Notre homme avait atteint là le couronnement de sa carrière, il avait réussi et était devenu un Véritable compositeur Norvégien.
Sa santé fragile se détériora et pourtant jusqu’en 1905 il poursuivit ses tournées Prague, Varsovie et Paris…
C’est au cours de l’été 1906 qu’il composa sa dernière œuvre, Quatre psaumes, inspirée elle aussi des musiques populaires Norvégienne.
En 1907, il fut terrassé par une attaque et reçut des funérailles dignes d’un héros national…
Sa femme le rejoindra en1935…
Cet homme c’est Edouard Grieg, vous l’aviez peut-être deviné…
Comme le peintre Suédois Carl Larson dont je vous avais parlé en décembre, Grieg est un compositeur de la Lumière, de la clarté intérieur qui nous envahie lorsque nous l’écoutons…
Des images viennent à nous, aux premières notes et par exemple pour cette Suite n°1, Au matin qui correspond à l’Acte IV de Peer Gynt, souvenez-vous…
Peer est en Afrique du Nord et il contemple le lever du soleil sur le désert.
Les premières secondes s’ouvrent sur une mélodie à la flute…
Puis c’est le tour du hautbois et les cordes apparaissent !
Une étendue de sable bien sur, mais aussi son pays, ses montagnes, ses lacs et ses rivières et à travers ce morceau j’imagine plus la Norvège que le désert… Chacun se transporte où il veut et comme il veut avec lui !
Allez vite, courez et cliquez pour écouterICI
J’ai changé de thème, mis de la couleur sur ma toile car après tout c’est le printemps partout alors pourquoi pas ici !
En décembre mon lecteur audio disparaissait comme par magie ….
Je change de thème et voilà qu’il refait son apparition, il était comme moi et attendait le printemps avec impatience !
Un peu de rose, un peu de blanc et le cœur revient à l’ouvrage…
Je peux passer de la musique, Ma musique !
Maintenant soyez tout ouïe…
Toujours extrait de Peer Gynt, la chanson de Solveig.
Là, le silence se fait, chutt…
Vous allez surement reconnaître et vous dire tiens, déjà entendu !
Oui, Gainsbourg s’inspirait beaucoup des classiques et là pour Jane il a fait fort… Lost song…
Souvenez –vous, il fait très froid et Peer s’est construit une cabane dans la neige et Solveig vient l’y rejoindre… 20 ans plus tard, il va mourir dans ses bras…
J’ai enfin trouvé la bonne traduction du Norvégien de la chanson !
L’hiver peut s’enfuir, le printemps bien aimé
Peut s’écouler,
Les feuilles d’automne et les fruits de l’été,
Tout peut passer.
Mais tu me reviendras, O mon doux fiancé,
Pour ne plus me quitter.
Je t’ai donné mon coeur, il attend résigné,
Il ne saurait (pourrait) changer.
Que Dieu daigne encore dans sa grande bonté,
Te protéger,
Au pays lointain qui te tient exilé,
Loin du foyer.
Moi je t’attends ici, cher et doux fiancé,
Jusqu’à mon jour dernier.
Je t’ai gardé mon coeur, plein de fidélité,
Il ne saurait changer.
Et puis grâce à mon petit lecteur retrouvé, vous aurez la chance d’écouter ma version préférée, celle de Lucia Pop, grande soprano Hongroise décédée en 1993.
Une pureté inégalable, et tellement d’émotion et de tristesse aussi dans cette voix magnifique …
C’est pour moi le symbole même de Grieg…
Etre heureux et pleurer… Comme ce peuple Norvégien l’été 1898 à Bergen…
Je dédie cette chanson à une autre Solveig qui se reconnaitra, n’est ce pas les filles…
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