Un dimanche pas comme les autres.
Avec des si , aujourd’hui je serais assise près du vieux chêne, je fermerais un peu les yeux à cause du soleil, et je t’ écouterais parler des élections bien sur et aussi de Julien qui va entrer au collège.
Des commerçants qui quittent le village, d’une auberge qui vient d’ouvrir, de Jean-Marc qui ne reprendra pas la suite de son père à la ferme, les petites nouvelles du pays que tu nous livres font de toi depuis 14 ans déjà un vrai provincial…
Avec des si, tu nous montrerais les photos de mariage du dernier couple que tu as uni, et nous tes nièces et ta sœur, nous nous serions moquées un peu de toi, parce que cet air sobre et solennel ne te ressemble pas.
Mais tu savais très bien que nous étions fières de ton écharpe et de ton humanité qui ont fait que dans ton nouvel havre de paix tout le canton t’avait adopté, toi l’ex-parisien devenu maire…
Avec des si, tu nous avertirais qu’à partir de 18 heures il te faudrait t’en aller, élections obliges…
Avec des si, tu nous aurais encore fait faire le tour du grand jardin, tu nous aurais emmené dans ton atelier pour nous montrer tes dernières aquarelles, encore des maisons, des roses trémières et des hortensias…
Tu aurais peut-être osé nous parler de quelqu’un, d’une femme rencontrée à la chorale et nous aurions souris en te disant, mais oui à 71 ans tout est encore possible, ne reste pas seul ! Et puis c’est vrai que tu fais si jeune…
Et avec ton sourire qui nous manque tant, tu aurais répondu, mais je suis jeune !
Avec des si, j’aurais pu encore me confier, parce que nous nous ressemblions beaucoup tous les deux, toi le plus jeune frère de papa…
On aurait parler de nous, de nos doutes, de nos souvenirs et des bons moments passés ensembles.. De mes parents, des mêmes choses bien sur mais qui nous faisaient du bien.
Avec des si, ta maison que tu voulais notre, serait toujours restée ouverte, accueillante, notre nid pour toutes les générations, une vraie maison de famille comme dans un film de Nina Companez.
Cette maison te ressemblait, comme une partie de toi…
Tu y avais mis toute ton énergie, tout ton cœur pour nous la faire aimer et nous l’aimions…
Avec des si, on ne se serait pas poser la question de savoir ce que l’on allait faire à Noël ou à Pâques !
La tradition nous amenait bien volontiers dans ta belle campagne bretonne ou le feu de ta grande cheminée réchauffait nos âmes et nos corps.
Même si…. Après ton douloureux divorce d’il y a 20 ans quand tu as rencontré Elle, l’Autre femme de ta vie, tellement différente.
Une annonce, une rencontre et quelques jours de vacances en Corse, et en moins de trois mois tu te remariais avec Celle qui a commencé à te séparer de ton fils, puis de nous…
Faire le vide, et Elle a réussi.
L’ambiance n’y était plus et nous te sentions mal à l’aise, sans savoir que tu étais malheureux…
Tu t’étais confié à moi juste avant ton départ, tu aurais voulu divorcer et elle faisait du chantage, la maison, l’argent et toi tu n’osais pas…
Avec des si, on pourrait faire reculer le temps, mais je ne suis pas magicienne, juste ta nièce qui pense à toi, en me disant que SI ELLE était partie avant toi , tout ce serait passé comme ce dimanche…
Parce que le jour de tes obsèques, Elle avait déjà retiré tes souvenirs, tes affaires et surtout tes aquarelles, tous les murs vides…
Vendu ta voiture pendant ta maladie et aujourd’hui, nous l’avons appris par des voisins, TA maison.
Nous ne l’avons pas revu depuis ce 21 juin, il y deux ans déjà….
Mais je ne veux pas être triste, seulement me souvenir des ces jolis moments passés en ta compagnie.
Parce que souvent quand nous sommes heureux, nous ne nous en apercevons même pas.
Lorsque la famille était réunie à table, et que la soupière fumait, Maman disait parfois :
- Cessez un instant de boire et de parler.
Nous obéissions.
Nous nous regardions sans comprendre, amusés.
- C’est pour vous faire penser au bonheur, ajoutait-elle.
Nous n’avions plus envie de rire.
Félix Leclerc Pieds nus dans l’aube
juin 8th, 2009 at 9 h 49 min
finalement nous ne sommes pas grand chose en ce bas monde … du jour au lendemain… tout peut disparaître… et redevenir poussière… sauf si, comme toi, la mémoire est conservée, préservée… merci Virginie pour cette grande humanité…
juin 8th, 2009 at 10 h 46 min
@Virginie: Pour ma part et ce qui me touche (cf mes posts) ce n’est pas “Elle” mais “l’autre” et sans majuscule !
octobre 12th, 2010 at 14 h 08 min
beaucoup d’émotion en lisant ces lignes.
La vérité toute nue.
Moralité dans la vie il faut oser changer de chemin.
Notre bonheur c’est à nous de le construire.
bises
septembre 25th, 2018 at 1 h 16 min
Bonjour, je suis la personne qui a réalisé l’aquarelle de la maison bretonne : sous “La tradition nous amenait bien volontiers dans ta belle campagne bretonne ou le feu de ta grande cheminée réchauffait nos âmes et nos corps.”
Pas de soucis particulier, si vous pouviez mettre le lien de mon espace perso : joelgeo.wordpress.com, je parle d’art, photos, videos tourisme alimentation, pierre…. merci beaucoup.joel balcaen.